Il y a des jours comme ci, il y a des jours comme ça,
Des jours ou tout va bien, vous avez un travail, une femme pas trop moche, un joli pavillon résidentiel, une Toyota dans le garage et Maurice, le poisson rouge qui barbote tranquillement dans son bocal 'avec toilette intégré' comme dit votre fils en riant
Il y a des jours comme çi, il y a des jours comme ça,
Et puis vient LE jour, non, pas 'LE jour ' genre votre mariage ou la naissance de vos bambins ou une connerie comme ça, non. Je vous parle du jour que vous n'oublierez jamais, celui ou un type respectable change votre vie pour toujours avec son marteau, même en appel.
O bien sûr vous l'aviez senti venir celle la, depuis le début il vous regardait d'un mauvais oeil.
Depuis ce matin de janvier ou dès votre arrivée au travail on vous l'avait présenté dans ce petit bureau de la place Suquet, votre bureau en fait.
Il vous avait gentiment expliqué pourquoi tous vos dossiers étaient méticuleusement fouillé par deux gringalets pas franchement sympa. D'ailleurs a y regarder de plus près ce n'était pas vos dossiers et lorsque fort de ce constat vous le fîtes remarqué à l'homme d'âge mûr vêtus d'un beau manteau noir celui se mit à rire sans interrompre sa besogne.
Puis on vous avait demandé de bien vouloir suivre ces messieurs au commissariat pour d'autre vérifications.
C'est ainsi que 6 mois plus tard vous vous retrouvé sur ce banc devant ce même homme d'âge mûr qui d'un coup de son putain de marteau vous déclare coupable sans sourciller, affaire suivante.
Vous vous ne comprenez pas, vous avez dû mal entendre, c'est une erreur, votre patron va arriver et vous disculper en reconnaissant tous les détournements d'argent dont on vous accuse.
Votre avocat vous rassure, on gagnera en appel vous serez bientôt libre.
On vous conduit dans un vieux bâtiment austère avec barreaux aux fenêtres et des barbelés au dessus des murs. C'est là que vous réalisez que vous n'en ressortirez pas avant très longtemps, vous en avez l'intime conviction, alors dans un dernier élan libertaire vous vous débattez pour échapper à tout ça, vous voudriez rentrer chez vous et vous assoire sur le canapé pour regardé une de ces conneries à la télé qui vous change les idées.
Mais on vous frappe, alors docilement vous vous effondrez sous les matraques et les injures.
La prison.
Finalement votre plus grand ennemi ce n'est pas le manque de liberté, ou la solitude ou encore les autres détenus, non ce qui vous tue a petit feu c'est l'ennui, la même cellule de 4 mètres sur 2 tous les jours, les même murs, les même repas, la promenade toujours a la même heure, même vos passages aux toilettes finissent par être réglé comme un coucou suisse. Alors quand viens le dimanche et que vous êtes appelés au parloir c'est comme une bouffée d'air frais, vous n'avez pas grand chose a raconter alors vous écoutez votre femme et votre fils vous peindre leur humeurs et leur monde, un peu de vie par procuration.
Et vous tourner en rond comme Maurice dans son bocal, avec toilette intégré.
Puis peu à peu les visites s'espacent, on s'écrit des lettres, enfin vous surtout. Le monde n'est plus qu'un univers lointain, inaccessible et flou. Et vous écrivez, encore et encore, plus seulement des lettres, mais des histoires, des nouvelles, écrire pour ne pas penser, pour ne pas tomber dans cette apathie, cette démence imaginative qui vous tend les bras.
Comme vous êtes un bon mouton, on vous propose de faire des travaux d'intérêt généraux contre une petite réduction de peine, alors pendant quelques mois vous épuré les aires d'autoroute, les chiottes publiques et les parcs.
Et un an six mois et 24 jours après votre entrée vous êtes enfin autorisé a sortir.
On vous remet vos 'effets civils' que vous aviez en arrivant. Vous voilà sur le trottoir avec des vêtements trop large et 15 euros dans le portefeuille.
Vous reprenez contact avec votre ex-femme, ça ne se passe pas bien et vous vous faites jeter dehors par son nouveau compagnon sous les yeux de votre fils et de Maurice qui n'a même pas sourciller.
Ce soir vous dormirez sur un banc.
Votre ancienne boîte refusant ne serait ce que de vous recevoir vous vous inscrivez a l'ANPE, votre conseillère vous prévenant que 'dans la conjoncture actuelle ça risque d'être un peu difficile vous comprenez ,,,' Oui oui bien sûr que vous comprenez, vous avez eu tout le temps de comprendre comment le monde fonctionne dans votre bocal de 4 mètres sur 2, vous avez compris que c'est votre patron qui a eu raison, que pour s'en sortir il ne faut pas faire comme les autres et que le gâteau de la malhonnêteté est coupé en plus grosse part. Aujourd'hui si vous aviez l'occasion vous feriez probablement comme lui. La encore on vous jette dehors sans ménagement.
Alors vous retournez sur votre banc, remuant des idées noires, quels espoir vous reste il ? Quelle vie peut s'offrir à un ex-taulard, ex-mari, sans logement, sans boulot, sans argent et sans amis ?
Vous restez deux jours sur votre banc, complètement hors de la réalité.
Plus rien ne vous touche, plus rien ne vous importe, le monde n'agis plus sur vous comme si vous étiez toujours dans votre bocal, avec Maurice. A quoi bon continuer la route alors ?
Mais l'instinct de survie est tenace et la mort à ce coté définitif qui paradoxalement effraie beaucoup les gens qui pourtant toute leur vie se complaise dans le conservatisme et la constance. Alors vous tentez le tout pour le tout et vous décidez d'aller voir un éditeur pour lui présenter vos écrits, ces brouillons empreins de folie qui vous ont aidé a tenir tout au long de votre peine.
Il y a des jours comme çi, il y a des jours comme ça,
Et puis vient LE jour, non, pas 'LE jour ' genre votre mariage ou la naissance de vos bambins ou une connerie comme ça, non. Je vous parle du jour que vous n'oublierez jamais, celui ou un type respectable change votre vie pour toujours, répondant à votre appel.
Il y a des jours comme ci, il y a des jours comme ça,
Ainsi va la vie, ses peines et ses joies.